Horloge biologique

 

Depuis 10 ans, le docteur Hélène Duez travaille sur les rythmes biologiques et cherche notamment à comprendre le lien entre l’horloge biologique et le métabolisme. En effet, l’horloge biologique ou horloge circadienne, régule notre métabolisme en gérant les réactions biologiques nécessaires à son bon fonctionnement, comme par exemple, nos besoins en glucose. Le groupe de recherche du campus de l’Institut Pasteur de Lille composé de 15 personnes, cherche à comprendre comment et pourquoi le métabolisme est contrôlé par notre horloge biologique. De plus, l’équipe travaille à comprendre la relation de cause à effet entre les troubles des rythmes de vie et des pathologies comme le diabète, les maladies cardiovasculaires, les pathologies inflammatoires et bien d’autres.

horloge biologique dossier

Le fonctionnement de l’horloge

Notre métabolisme et la sécrétion des hormones s’adaptent à notre rythme de vie, et à nos besoins. Il y a un vrai contrôle par l’horloge qui permet d’anticiper les phases de sommeil, où nous sommes à jeun, et les phases éveillées, où l’on mange. Par exemple, le glucose dans le sang reste dans une zone physiologique bien qu’on alterne période de jeun et période de prise alimentaire.
En effet, si la glycémie est au-delà de la limite physiologique pendant trop longtemps, la paroi des vaisseaux sanguins peut être abimée et le corps inondé par le glucose, ce qui fatigue le pancréas inutilement et à terme risque de provoquer un diabète. Au contraire si la glycémie est en dessous de la limite physiologique, il y a des risques pour le cerveau, mais aussi un risque de coma hypoglycémique.
L’horloge permet de maintenir la glycémie en anticipation des phases de jeun ou de prise alimentaire : peu avant de nous réveiller l’horloge prépare notre organisme pour cette phase où nous allons manger : c’est-à-dire qu’elle demande à notre foie d’arrêter de fabriquer du sucre, puisque qu’il va bientôt en recevoir. Il en est de même pour le métabolisme des lipides : l’horloge orchestre les phases de stockage par le tissu adipeux et d’utilisation par le muscle en période post-prandiale, ou d’utilisation par le foie afin de stimuler la synthèse de novo de glucose pendant la période de jeun.

Un groupe de chercheurs dédié à l’Institut Pasteur de Lille

Des chercheurs du monde entier travaillent sur cette thématique. En 2005, ils ont prouvé que l’horloge contrôle le métabolisme. Le groupe de chercheurs au sein de l’unité « Récepteurs nucléaires, maladies cardiovasculaire et diabète » de l’Institut Pasteur de Lille essayent de comprendre comment cela se traduit dans les tissus. L’horloge a de nombreux composants. Parmi ceux-ci : Rev-erb-a, un récepteur nucléaire. C’est sur cet acteur de l’horloge que les chercheurs du groupe se focalisent. Il s’agit d’un gène particulièrement intéressant pour la régulation de l’horloge car son activité peut être modulée grâce à des molécules chimiques. Ainsi, grâce à cette manipulation, c’est le contrôle circadien du métabolisme et de l’inflammation qui pourrait être modifié.

Enjeu de santé publique

L’enjeu de santé publique est grand puisque les personnes dont l’horloge est déréglée sont plus à risque de développer un diabète, des maladies cardio-vasculaires, des cancers, un vieillissement prématuré, une dépression… La liste est longue car lorsque notre horloge ne fonctionne pas bien c’est à peu près tout notre organisme qui se dérègle petit à petit. Ce dérèglement provoque à terme de nombreuses maladies ou tout au moins précipite le développement de maladies.

Les scientifiques de l’Institut Pasteur de Lille cherchent à comprendre le fonctionnement de Rev-erb-a dans les tissus et dans différentes situations, afin de savoir dans quelle mesure et à quel moment il peut réguler notre horloge biologique. L’objectif, à terme, est de développer des candidats médicaments agissant sur l’horloge pour rétablir son fonctionnement grâce notamment à des composés chimiques impactant Rev-erb-a. Rétablir le bon fonctionnement de l’horloge c’est rétablir le fonctionnement du métabolisme et du système immunitaire.

Fatigué ou horloge pertubée ?

Il est difficile de découpler l’effet d’un manque de sommeil de l’effet d’une horloge perturbée, les deux étant intimement liés. Aujourd’hui, des études sont menées en laboratoire afin de dérégler l’horloge de manière artificielle. Les techniques utilisées en laboratoire ont prouvé que lorsque l’horloge est déréglée on mange plus, on mange mal, on ne mange pas à la bonne heure, et tout cela fait que l’on est plus à risque de développer de multiples pathologies.

Itinéraire d’un chercheur

Hélène Duez, une histoire de passion

Depuis son plus jeune âge, Hélène Duez est passionnée par la biologie. C’est à 15 ans qu’elle se décide à devenir chercheuse.

A l’origine du déclic : une interview de François Jacob, prix Nobel de médecine. « Il avait les yeux qui brillaient, son récit était passionnant. ». Elle effectue une licence puis une maîtrise en biochimie. Mais après ces quatre années, elle ne sait toujours pas ce qu’être chercheur signifie. Elle décide alors de faire une pause dans ses études et de travailler dans un laboratoire de recherche afin de se confronter aux réalités du terrain. Cette expérience la confortant dans son choix, elle reprend un DEA et une thèse sur les récepteurs nucléaires, qu’elle effectuera à l’Institut Pasteur de Lille.

En 2004, elle décide de partir travailler sur le diabète au Canada. Son but : acquérir une expertise complémentaire et découvrir comment les recherches se déroulent dans d’autres pays, afin de conserver le positif pour travailler le plus efficacement possible.

Institut Pasteur Hélène Duez

Après 3 années, elle revient en France, passe les concours INSERM et obtient rapidement un poste à l’Institut Pasteur de Lille. Elle reprend alors son sujet de thèse et y ajoute une dimension sur le rythme biologique. Aujourd’hui, avec l’aide de son groupe de recherche, elle cherche à comprendre comment et pourquoi le métabolisme est contrôlé par notre horloge biologique. De plus, l’équipe travaille à comprendre la relation de cause à effet entre les troubles des rythmes de vie et des pathologies comme le diabète, les maladies cardiovasculaires, les pathologies inflammatoires et bien d’autres.

Aujourd’hui, le docteur Hélène Duez prend à cœur de former et d’informer les plus jeunes au monde de la science et aux différents métiers nécessaires à son fonctionnement, elle tente de faire comprendre « qu’il n’y a pas besoin d’être premier en maths, il suffit juste d’être passionné !». C’est avec cette passion et une volonté à toute épreuve que le groupe s’attache à expliquer l’importance de la recherche et son accessibilité à tous auprès du grand public.

Lauréate du premier appel à projet du Centre Trandisciplinaire de Recherche sur la Longévité

Le Centre Transdisciplinaire de Recherche sur la Longévité (CTRL) a pour objectif principal de contribuer à l’allongement de l’espérance de vie en bonne santé après l’âge de 60 ans en détectant les facteurs de risque de développer des maladies dégénératives et en limitant leurs conséquences.

En 2017, dans le cadre du premier appel à projet CTRL, Hélène Duez et François Trottein ont proposé un projet sur les conséquences du dysfonctionnement du rythme circadien lié à l’âge sur les défenses immunitaires innées contre les infections respiratoires.

Cette collaboration est le fruit d’une réflexion initiée par les deux chercheurs depuis de longues années et rendue possible par l’appel à projet du Centre Transdisciplinaire de Recherche sur la Longévité. Ces travaux permettent non seulement à des chercheurs d’équipes différentes de travailler ensemble grâce à des ressources et compétences communes et complémentaires. Mais aussi d’agir concrètement pour que la population puisse vivre mieux plus longtemps. Car non seulement, les dérèglements de l’horloge biologique entrainent une diminution des défenses immunitaires et donc des infections mais une fois infectées, les personnes âgées se soignent moins bien que les adultes.

Thématique de recherche

microbiote pasteur lille